Des Russes éminents : Grigory Orlov

Grigory Orlov était un homme d’État russe et le favori de Catherine la Grande qui a organisé le coup d’État pour la placer sur le trône de Russie et a ensuite aidé l’impératrice à gouverner le pays.

Contexte familial

Grigory Orlov est né le 17 octobre 1734, dans une famille noble russe qui a produit plusieurs hommes d’État, diplomates et soldats distingués. Grigory Orlov senior a servi le Tsar et a atteint le rang de Conseiller d’Etat. Au début des années 1740, il était l’un des vice-gouverneurs de la ville de Novgorod. Il s’est marié tardivement et sa femme était trois fois plus jeune que lui.

Ils ont eu 9 fils, mais seulement 5 d’entre eux ont survécu. Les cinq frères ont chacun rendu de grands services et accompli de grandes actions à la cour de Russie ; Grigory est devenu le paramour de Catherine II, Aleksey commandera la flotte russe dans la guerre contre les Turcs, Vladimir est devenu sénateur, et Fyodor et Ivan ont été nommés chambellans après le coup d’État qui a intronisé Catherine II tout en tuant son mari, Pierre III.

L’amant de Catherine

Grigory a commencé son histoire d’amour avec Catherine alors qu’elle n’était que grande-duchesse. Les détails de l’enfance de Grigory Orlov ont échappé à l’histoire, mais on sait qu’il a été éduqué au corps des cadets de Saint-Pétersbourg. En 1749, il a commencé sa carrière militaire dans la guerre de Sept Ans de 1756-1763, un conflit militaire mondial qui a touché un certain nombre de pays, dont la Russie.

Orlov était un officier dans la division d’artillerie, tandis que deux de ses frères, Aleksey et Vladimir, étaient simplement des soldats ordinaires dans les gardes. Alors qu’il servait dans la capitale en tant qu’officier d’artillerie, il attira la convoitise de la future impératrice Catherine et prit la tête de la conspiration visant à renverser et à assassiner son mari Pierre III en 1762.

Portrait du jeune comte Grigory Orlov par A. Cherny, fin des années 1760

Orlov était un homme très fort et beau, toujours populaire auprès des femmes. Il y eut un incident impliquant une liaison entre Orlov et la princesse Kourakina, la maîtresse de son collègue Pyotr Shuvalov. Le conflit entre les deux hommes s’est terminé par un duel, au cours duquel Orlov a tué Shuvalov. Toute cette série d’événements a été suivie d’un grand scandale.

Les rumeurs de cet incident arrivèrent aux oreilles de Catherine, et par curiosité, elle souhaita rencontrer le jeune homme dont les grands exploits amoureux faisaient l’objet de la conversation publique. Orlov fut secrètement présenté à la grande-duchesse, et lorsqu’ils devinrent amants, elle lui dévoila ses plans ambitieux pour prendre le trône à son mari. Orlov était résolu à faire de Catherine sa seule souveraine et commença à rassembler une équipe de partisans.

Après le coup d’état de 1762

Peter III, le mari de Catherine était sur le trône depuis peu de temps et était un échec en tant que dirigeant et mari. Un exemple de sa négligence envers Catherine est que quelques mois après leur mariage, elle était encore vierge. Dans ses dernières années, elle fera plus que compenser ce début aigre de sa vie personnelle.

Dès que l’impératrice Catherine II se vit fermement installée sur le trône, elle récompensa les participants à la révolte en leur prodiguant titres et argent. Grigory Orlov fut promu au rang de major-général et reçut le titre de comte. Il était son favori et son premier conseiller. En dehors de sa bonne mine et de sa brièveté, Orlov ne possédait ni les avantages d’une naissance noble ni une bonne éducation.

Le caractère et la personnalité d’Orlov

Même selon Catherine II, qui avait toujours été plus encline à exagérer les mérites de ses amants, Orlov était peu instruit et sa connaissance du français était si limitée qu’il ne pouvait pas lire dans cette langue et ne comprenait pas la poésie. Cependant, Catherine le considérait comme « une créature étonnante, dotée de beauté, d’une âme merveilleuse et d’intelligence ».

Portrait du comte et du prince Grigory Orlov par Vigilius Erichsen

Elle le considérait comme le plus bel homme de l’époque. Il surpassait ses frères en beauté, force, courage et détermination. Il avait un cœur chaleureux et était d’une générosité insouciante. Mais malheureusement, il était parfois indiscret, ce qui le faisait paraître moins sophistiqué qu’il ne l’était probablement.

Orlov était très spirituel, avait une appréciation assez précise de l’actualité, et était un conseiller utile et sympathique pendant la première partie du règne de Catherine. Il entreprit avec beaucoup d’enthousiasme la question de l’amélioration de la vie des serfs et de leur émancipation partielle. En tant que président de la Société économique libre, il fut également leur plus éminent défenseur lors de la grande commission de 1767, bien que son objectif premier était de plaire à l’impératrice, qui faisait preuve d’une grande libéralité dans ses premières années.

Un passe-temps scientifique

Orlov avait une passion pour les sciences naturelles. Il aimait essayer diverses expériences simples en chimie et en physique et il décrivait avec ferveur à l’impératrice comment un verre rempli d’eau se fissurait après avoir gelé. Il avait équipé un observatoire d’un télescope où il passait des heures à contempler des vues incroyables.

Bien sûr, il n’était qu’un amateur de science, mais c’est Orlov qui a acheté et rassemblé les documents laissés par le scientifique russe Mikhaïl Lomonosov après sa mort. Il a également présenté à l’impératrice l’inventeur Ivan Kulibin, alors inconnu, et l’écrivain satirique Denis Fonvizin.

La lutte contre la grande peste

Orlov s’est toujours abstenu de prendre part à la vie politique du pays. Il ne participe aux relations extérieures qu’à l’instigation de Catherine, mais les diplomates étrangers ne l’ont jamais considéré comme un partenaire fiable. N’ayant pas de position politique particulière, il changeait souvent d’avis. Sa vie à la cour est interrompue par une épidémie de peste à Moscou, où il est envoyé pour faire face à la catastrophe.

L’impératrice avait déjà envoyé des secours pour arrêter la propagation de la maladie, mais cela n’eut aucun effet. Il fallait que quelque homme d’autorité se rende à Moscou pour les faire se soumettre aux règlements prescrits, et à l’observation d’une propreté plus grande que d’habitude. Grigori Orlov eut le courage d’y aller et de braver à la fois la peste et la superstition. Le comte Orlov, doté par l’impératrice de pouvoirs exceptionnels, arrive dans la ville.

Les armoiries de la famille Orlov

Il mit en place une commission exécutive préventive, prit des mesures pour assurer l’approvisionnement en provisions de la population restée encore dans la ville, augmenta le nombre de stations de quarantaine et d’hôpitaux. Il interdit et empêche toutes sortes d’assemblées. Les malades recevaient non seulement de la nourriture gratuite, mais aussi des vêtements et de l’argent. Il a offert l’utilisation de sa propre maison comme hôpital ; un orphelinat financé par le gouvernement a été ouvert ; plus de six mille maisons avec des résidents malades ont été désinfectées.

Selon ses contemporains, Orlov visitait personnellement les hôpitaux, fournissait une assistance aux personnes infectées, apparaissait parmi le public et prenait part aux processions religieuses. Sur ses instructions, les morts étaient enterrés dans des cimetières spéciaux. La maladie a finalement cédé aux attentions incessantes d’Orlov et à la rigueur de l’hiver.

A son retour à Saint-Pétersbourg, Grigory Orlov trouva en Catherine une souveraine reconnaissante. Il reçoit un accueil très chaleureux. Une médaille spéciale « Pour avoir délivré Moscou de la peste » fut frappée en son honneur, et des portes triomphales en marbre furent érigées dans les jardins de Tsarkoye Selo avec l’inscription « Moscou sauvée du désastre par Orlov ».

C’est au cours de cette période qu’Orlov commença à dépasser ses perspectives, ses actions frisant la prétention. Il se flattait du type d’accès qu’il avait à l’impératrice, et bien qu’elle soit agacée par son arrogance, elle ne pouvait pas risquer une dispute avec l’homme qui l’avait mise sur le trône.

En 1762, Catherine donna naissance à Aleksey, son fils illégitime et celui d’Orlov. Il fut nommé d’après le village de Bobriki où il vivait, commençant officiellement la lignée noble des comtes Bobrinsky.

Conspirations

L’influence d’Orlov devint immense après la découverte d’un complot visant à assassiner toute la famille Orlov. A cette époque, l’impératrice pensait même épouser son favori, mais le plan fut ruiné par son influent conseiller Nikita Panin.

Bien qu’il n’y ait pas eu de mésentente ouverte entre Panin et le comte Grigory Orlov, Panin souhaitait néanmoins la chute d’Orlov. Rusé, et certainement trop timide pour attaquer ouvertement Orlov, il ne manquait aucune occasion de l’attaquer sur le côté. Le comportement d’Orlov était presque l’exact opposé. Il n’a jamais haï personne, bien qu’il ait été détesté par beaucoup. Son arrogance lui avait valu un grand nombre d’ennemis.

Catherine avait été, et est toujours très attachée à Orlov. Celui-ci, au contraire, n’avait jamais éprouvé pour Catherine une affection naturelle, mais seulement celle qui naissait de la gratitude et de l’ambition. Fier de la faveur de sa souveraine, il cultivait son succès, et dès qu’il s’aperçut qu’il avait acquis suffisamment de réputation et d’autorité, sa passion commença à se refroidir ; il prit un air distant et entama même une intrigue avec sa nièce qui était aussi la dame d’honneur de l’impératrice.

Plus Catherine souhaitait renouveler son affection, plus il semblait enclin à se retirer et à chercher son amusement dans la compagnie d’autres dames. L’impératrice ne pouvait que s’indigner de cette conduite ingrate. Cependant, en raison de son affection pour Bobrinsky (l’enfant d’Orlov), elle ne l’abandonna pas immédiatement. Elle éleva le garçon en privé dans les faubourgs de Saint-Pétersbourg, et se déguisa souvent lorsqu’elle lui rendit visite.

En attendant, Orlov fut informé que l’impératrice avait finalement décidé de se débarrasser de lui. Afin de raviver l’affection de Catherine, Grigory lui offrit l’un des plus grands diamants du monde, connu depuis lors sous le nom de diamant Orlov.

Il fut l’un des premiers partisans de l’idée slavophile d’émanciper les chrétiens du joug ottoman. En 1771, il fut envoyé comme premier plénipotentiaire russe au congrès de la paix, mais il échoua dans sa mission, en raison de l’obstination des Ottomans, et en partie – selon Nikita Panin – de sa propre insolence scandaleuse.

Dernières années et mort

En rentrant sans permission dans son palais de marbre à Saint-Pétersbourg, il se trouve supplanté dans la faveur de l’impératrice par le jeune Potemkine. Orlov devint une personne sans importance à la cour, et partit à l’étranger pour quelques années.

Il revint en Russie quelques mois avant sa mort à Moscou le 13 avril 1783. Pendant un certain temps avant sa mort, il a souffert de délires. Plus tard dans sa vie, il épousa sa nièce, Ekaterina Zinovyeva, mais leur mariage fut sans enfant. Il fut enterré dans le village d’Otradnoye, dans le district de Serpukhov, près de Moscou.

Écrit par Olga Prodan, RT